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La restructuration des branches professionnelles à l’épreuve du Conseil constitutionnel

le référentiel de la cnil

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 2 octobre 2019 par le Conseil d’État d’une QPC relative à la conformité aux droits et libertés, que la Constitution garantit, de plusieurs dispositions du Code du travail, articles L 2261-32, L 2261-33 et L 2261-34, réunis dans une section consacrée à la restructuration des branches professionnelles.

Dans une décision du 29 novembre 2019 (Conseil Constitutionnel du 29 novembre 2019, n° 2019-816, QPC JO 30 novembre), il censure un alinéa de l’article L 2261-32 et émet deux réserves d’interprétation concernant les effets de la fusion et la représentativité des partenaires sociaux.

Il faut relever que dans cette décision, le Conseil constitutionnel reconnaît que la liberté contractuelle, principe ayant valeur constitutionnelle, s’applique en matière de négociation collective et que, s’il est loisible au législateur d’y apporter des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, c’est à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi.

Censure…

Les trois articles précités permettent au ministre du travail de fusionner le champ d’application des conventions collectives d’une branche professionnelle avec celui d’une branche de rattachement présentant des conditions sociales et économiques analogues.

Selon l’article L 2261-32 du Code du travail, cette procédure peut être engagée :

  1. Lorsque la branche compte moins de 5 000 salariés.
  2. Lorsque la branche a une activité conventionnelle caractérisée par la faiblesse du nombre des accords ou avenants signés et du nombre des thèmes de négociations couverts.
  3. Lorsque le champ d’application géographique de la branche est uniquement régional ou local.
  4. Lorsque moins de 5 % des entreprises de la branche adhèrent à une organisation professionnelle représentative des employeurs.
  5. En l’absence de mise en place ou de réunion de la commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation compétente.
  6. En l’absence de capacité à assurer effectivement la plénitude de ses compétences en matière de formation professionnelle et d’apprentissage.

Elle peut également être engagée pour fusionner plusieurs branches « afin de renforcer la cohérence du champ d’application des conventions collectives ».

Cet alinéa est jugé contraire à la Constitution.

Selon la décision du Conseil constitutionnel, « le législateur n’a pas déterminé au regard de quels critères cette cohérence pourrait être appréciée. Il a ainsi laissé à l’autorité ministérielle une latitude excessive dans l’appréciation des motifs susceptibles de justifier la fusion. Il a, ce faisant, méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions affectant la liberté contractuelle ».

La déclaration d’inconstitutionnalité prend effet à compter de la date de publication de la décision, soit le 30 novembre 2019 et est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

S’agissant des autres alinéas contestés, le Conseil juge que le législateur a apporté des garanties suffisantes.

Il rappelle qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu remédier à l’éparpillement des branches professionnelles dans le but de renforcer le dialogue social au sein de ces branches et de leur permettre de disposer de moyens d’action à la hauteur des attributions que la loi leur reconnaît, en particulier pour définir certaines des conditions d’emploi et de travail des salariés et des garanties qui leur sont applicables, ainsi que pour réguler la concurrence entre les entreprises.

« Ce faisant, le législateur a poursuivi un objectif d’intérêt général. »

Et reprenant chacun des critères énoncés à l’article L 2261-32, le Conseil conclut que, compte tenu du motif d’intérêt général poursuivi, l’atteinte porté à la liberté contractuelle n’est pas disproportionnée.

 … et réserves d’interprétation

  • Effets sur les stipulations de la convention collective de branche rattachée

Une première réserve concerne l’article L 2261-33 du Code du travail selon lequel, en cas de fusion des champs d’application de plusieurs conventions collectives ou en cas de conclusion d’un accord collectif regroupant le champ de plusieurs conventions existantes, les stipulations conventionnelles applicables avant la fusion ou le regroupement, lorsqu’elles régissent des situations équivalentes, sont remplacées par des stipulations communes, dans un délai de cinq ans à compter de la date d’effet de la fusion ou du regroupement. Pendant ce délai, la branche issue du regroupement ou de la fusion peut maintenir plusieurs conventions collectives.

« A défaut, seules s’appliquent dans la branche issue de cette fusion les stipulations de la convention collective de la branche de rattachement » (article L 2261-33 du Code du travail).

Le Conseil constitutionnel émet une réserve sur cet alinéa. « Ces dispositions ne sauraient, sans porter une atteinte excessive au droit au maintien des conventions légalement conclues, mettre fin de plein droit à l’application des stipulations de la convention collective de la branche rattachée qui régissent des situations spécifiques à cette branche. »

  • Effets sur la représentativité des partenaires sociaux

La seconde réserve porte sur l’article L 2261-34 qui énonce que, jusqu’à la mesure de la représentativité des organisations professionnelles d’employeurs qui suit la fusion de champs conventionnels ou la conclusion d’un accord collectif regroupant le champ de plusieurs conventions préexistantes, sont admises à négocier les organisations professionnelles d’employeurs représentatives dans le champ d’au moins une branche préexistant à la fusion ou au regroupement.

L’audience de ces organisations s’apprécie alors au niveau de la branche issue de la fusion (article L 2261-34 du Code du travail).

Selon le Conseil, ces dispositions ne sauraient, sans méconnaître la liberté contractuelle, « être interprétées comme privant les organisations d’employeurs et de salariés, en cas de perte de leur caractère représentatif à l’échelle de la nouvelle branche à l’issue de la mesure de l’audience suivant la fusion, de la possibilité de continuer à participer aux discussions relatives à l’accord de remplacement, à l’exclusion de la faculté de signer cet accord, de s’y opposer ou de s’opposer à son éventuelle extension ».

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