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Fractionnement du congé principal : le salarié ne peut pas renoncer par avance à ses droits

cotisations

Dans un arrêt du 5 mai 2021 (n° 20-14.390), la Cour de cassation s’est prononcée sur un litige portant sur le fractionnement des congés payés.

Rappel succinct des règles applicables en matière de fractionnement :

En application de l’article L. 3141-23 du Code du Travail, le congé principal (congé d’été) d’une durée supérieure à 12 jours ouvrables, et au plus égale à 24 jours, ne peut être fractionné qu’avec l’accord du salarié.

Par ailleurs, une fraction d’au moins 12 jours ouvrables doit être prise en continu entre 2 jours de repos hebdomadaires, entre le 1er mai et le 31 octobre (articles L. 3141-19 et L. 3141-23 du Code du Travail).

En application de l’article L. 3141-23 du Code du Travail, et sauf accord collectif contraire, les jours du congé principal pris en dehors de la période 1er mai au 31 octobre peuvent donner lieu à des jours de congés payés supplémentaires, appelés « jours de fractionnement ».

L’employeur doit ainsi octroyer aux salariés, sauf renonciation individuelle des intéressés :

  • 2 jours ouvrables supplémentaires si le salarié prend au moins 6 jours ouvrables de congé principal en dehors de la période allant du 1er mai au 31 octobre,
  • 1 jour ouvrable supplémentaire s’il prend de 3 à 5 jours ouvrables du congé principal en dehors de cette période.

Les jours de congé principal dus au-delà de 24 jours ouvrables ne sont pas pris en compte pour l’ouverture du droit à ce supplément.

Par ailleurs, en application de l’article L. 3141-19 du Code du Travail, un accord collectif d’entreprise ou d’établissemnt (ou, à défaut, un accord de branche) peut également écarter l’attribution de jours supplémentaires de congé dans le cadre de la fixation des règles de fractionnement

Sauf accord collectif ou en cas de fermeture de l’établissement, le fractionnement des congés n’est donc possible qu’avec l’accord du salarié.

La renonciation doit donc être écrite et expresse ; aucun formalisme précis n’est toutefois imposé.

C’est ainsi qu’il est désormais jugé que la preuve de la renonciation est rapportée lorsque le salarié a rempli un formulaire de demande de congés mentionnant que leur fractionnement vaut renonciation (Cass. Soc. 30 septembre 2004, n° 13-13.315).

En revanche, la preuve de la renonciation du salarié aux jours de congés supplémentaires ne peut résulter de l’existence d’une note de service subordonnant le fractionnement à une renonciation (Cass. Soc. 13 décembre 2006, n° 05-42.116) ou de la non-réclamation de ces jours plusieurs années durant (Cass. Soc. 3 mars 1988, n° 85-40.723).

Quid d’une clause insérée dans le contrat de travail ? Les salariés peuvent-ils, par ce biais, donner leur accord au fractionnement du congé principal et renoncer par avance à leurs droits aux jours de fractionnement ?

Les faits :

Plusieurs salariés ont saisi la juridiction prud’homale afin de demander la condamnation de leur employeur au paiement de dommages-intérêts au titre de :

  • la privation du droit à congé légal, en raison de l’absence d’accord des salariés au fractionnement des congés,
  • et la privation de deux jours supplémentaires de congé fractionnement.

Concrètement, les contrats de travail prévoyaient que les jours de fermetures liés aux fêtes religieuses étaient obligatoirement décomptés des congés payés, ce qui en pratique amené nécessairement à un fractionnement du congé principal.

Les salariés peuvent-ils renoncer par avance, et notamment via leur contrat de travail, au bénéfice des règles applicables en matière de fractionnement du congé principal ?

La réponse de la Cour de cassation :

Après avoir exposé les règles en vigueur en matière de fractionnement, la Haute Cour rappelle que :

  • d’une part que : « … Le droit à des congés supplémentaires naît du seul fait du fractionnement, que ce soit le salarié ou l’employeur qui en ait pris l’initiative… »,
  • d’autre part que : « … Le salarié ne pouvant pas renoncer par avance au bénéfice d’un droit qu’il tient de dispositions d’ordre public avant que ce droit ne soit né, il ne peut renoncer dans le contrat de travail à ses droits en matière de fractionnement du congé principal… ».

Les salariés obtiennent gain de cause, et ce notamment parce qu’ils n’avaient ni donné leur accord pour le fractionnement de leur congé principal, ni renoncé à leurs droits à des jours de congés supplémentaires du fait de ce fractionnement.

Les règles appliquées sont celles antérieures à l’entrée en vigueur de la loi Travail du 8 août 2016, mais cette jurisprudence semble parfaitement transposable à la législation actuelle.

En pratique, la prise du congé principal de manière fractionnée reste possible, mais, sauf accord collectif en vigueur de l’entreprise ou situation de fermeture de l’entreprise, l’employeur doit veiller à recueillir l’accord express du salarié au moment du fractionnement envisagé et non pas d’une manière générale et globale par le biais du contrat de travail.

Bien que rendue sous l’empire des dispositions antérieures à l’entrée en vigueur de la loi Travail du 8 août 2016, la décision reste à notre sens valable dans le cadre de la législation actuelle, les principes consacrés ayant manifestement une portée générale.

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/513_5_46983.html

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