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Élections professionnelles : le lieu de dépouillement ne peut pas être fermé à clé

L’élection doit respecter les principes généraux du droit électoral. Le manquement à l’un d’eux constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections. La sincérité des opérations électorales constitue l’un de ces principes. Si l’employeur doit assurer la bonne tenue des élections professionnelles, il se doit de respecter certaines règles.

Assurer l’accès au lieu de dépouillement en est une, et elle s’entend strictement. C’est à ce sujet que la Cour de cassation se prononce dans un arrêt du 21 septembre 2022. Dans cette affaire que l’entreprise, en accord avec les organisations syndicales dans le cadre d’un avenant au protocole préélectoral, met en place des modalités de sécurisation du scrutin en raison des incidents ayant entaché le précédent processus électoral.

L’objectif était de « prévenir toute manipulation des suffrages comme constaté lors des précédentes élections ».

Il est notamment prévu que les opérations de dépouillement, « particulièrement houleuses lors du scrutin précédent », seraient opérées par un huissier, mais sans que les électeurs n’aient accès à la salle de dépouillement. Celle-ci serait toutefois visible depuis une baie vitrée. Un syndicat invoque l’existence d’atteintes à des principes généraux du droit électoral et demande l’annulation des élections.

Le tribunal judiciaire fait droit à sa demande. L’employeur conteste au motif que, pour annuler les élections, le juge aurait dû « démontrer que les modalités de dépouillement choisies n’étaient pas de nature à assurer la sincérité du scrutin au regard du contexte dans lequel s’était déroulé le précédent scrutin ». Mais la Cour de cassation donne raison au tribunal judiciaire.

Elle commence par rappeler « qu’en application des articles L. 67 et R. 63 du code électoral, la circonstance que les électeurs n’ont pas eu accès librement au lieu du dépouillement est de nature à affecter la sincérité des opérations électorales et constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections ».

Ainsi, le tribunal ayant constaté « que la porte d’accès à la salle de vote était fermée lors du dépouillement, ce qui interdisait aux candidats, à leurs représentants ainsi qu’à tout électeur d’y accéder librement, en a exactement déduit que cette absence de publicité des opérations de dépouillement était de nature à affecter la sincérité du scrutin, peu important l’existence d’une baie vitrée offrant une vue sur la salle de vote ».

Cette solution n’est pas surprenante mais elle constitue une intéressante illustration.

En effet, il a déjà été jugé que lorsque le dépouillement a eu lieu, à l’initiative de l’employeur, dans un lieu secret connu des seuls scrutateurs désignés par les organisations syndicales, les électeurs n’ayant pas eu accès librement au lieu de dépouillement, cela est de nature à nuire à la sincérité des opérations de vote et constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections (Cass. soc., 18 déc. 2000, n° 00-60.033).

De même, la circonstance que les électeurs n’aient pas eu accès librement au lieu du dépouillement est de nature à affecter la sincérité des opérations électorales et constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections (Cass. soc., 28 mars 2012, n° 11-16.141).

Il convient de noter par ailleurs dans l’affaire jugée le 21 septembre 2022, que ces modalités de dépouillement étaient prévues dans un avenant au protocole préélectoral.

Cela ne fait pas obstacle à une contestation des stipulations de ce protocole contraires à l’ordre public, notamment en ce qu’elles méconnaîtraient les principes généraux du droit électoral (Cass. soc., 4 juill. 2012, n° 11-60.229).

Cependant, lorsque le protocole préélectoral est conclu aux règles de double majorité, un syndicat qui l’a signé ou qui a présenté des candidats sans émettre de réserves ne peut en contester la validité après la proclamation des résultats, quand bien même il invoquerait une méconnaissance de règles d’ordre public, notamment en ce qu’elles méconnaîtraient les principes généraux du droit électoral (Cass. soc., 24 nov. 2021, n° 20-20.962) (v. notre article).

Il n’en est pas question dans cette affaire, mais ce point mérite d’être souligné.

https://www.courdecassation.fr/decision/632bfe496ed81805da0b02d3

 

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