Knowledge is power

Be in the know when new articles are published

Actualisation sociale – axe 2 : visite médicale et droit de l’inaptitude

Actualisation sociale

Animée par Pascal PETREL

Campus Juillet Les 6 et 7 juillet 2017

AXE 2 : Visite médicale et droit de l’inaptitude

Alléger les obligations pesant sur les employeurs en matière de santé au travail, voici l’une des ambitions de la loi dite « Travail » et du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016 relatif à la modernisation de la médecine du travail. Les modalités de surveillance médicale des salariés sont assouplies et plusieurs points dans le régime de l’inaptitude sont modifiés.

Tout récemment, ces dispositions ont encore été retouchées par le décret n°2017- 1008 du 10 mai 2017. Ce dernier est entré en vigueur le 12 mai 2017.

  1. Le nouveau principe : la visite d’information et de prévention

Depuis le 1er janvier 2017, la visite médicale est remplacée par la visite individuelle d’information et de prévention. Ce n’est pas une visite médicale mais plutôt d’un dialogue entre le travailleur et le professionnel de santé.

  1. Pour qui et quand ?

Tout salarié non affecté sur un poste à risque bénéficie à l’embauche d’une visite d’information et de prévention, réalisée par un membre de l’équipe pluridisciplinaire en santé. La déclaration préalable à l’embauche vaut demande de visite d’information et de prévention.

Situations des salariés Délai de la visite Réorientation possible vers le médecin du travail
Salarié non affecté à un poste de travail à risque Dans les trois mois suivant l’affectation sur le poste Suivi périodique au maximum tous les 5 ans
Travailleur de nuit, exposé à certains risques ou jeune de moins de 18 ans Avant l’affectation sur le poste Suivi périodique au maximum tous les 3 ans
Femme enceinte et travailleur handicapé / invalide Dans les trois mois suivant l’affectation sur le poste Suivi périodique au maximum tous les 3 ans
  1. Déroulé de la visite

Lors de cette visite, un dossier médical en santé au travail est ouvert au bénéfice du salarié. Elle a notamment pour objet d’interroger le salarié sur son état de santé, l’informer sur son suivi médical et identifier si sa situation nécessite une orientation vers le médecin du travail. Le professionnel de santé lui délivre une attestation de suivi, également adressée à l’employeur (R. 4624-14 du Code du travail). Celle-ci ne permet pas d’attester de l’aptitude médicale du salarié. La visite d’information et de prévention est renouvelée périodiquement, selon une périodicité fixée par le médecin du travail et qui ne peut pas excéder 5 ans.

Si le travailleur a déjà bénéficié d’une visite d’information et de prévention dans les 5 ans précédant son embauche, il peut être dispensé de visite si les conditions suivantes sont réunies :

  • –  le salarié va occuper un emploi identique présentant des risques équivalents,
  • –  il n’a fait l’objet d’aucune mesure individuelle d’adaptation, d’aménagement ou de transformation de poste ni d’aucun avis d’inaptitude physique au cours de

ces 5 ans,

– le professionnel de santé est en possession de la dernière attestation de suivi ou du dernier avis d’aptitude.

Si, à l’issue de la visite d’information et de prévention, le salarié est orienté vers le médecin du travail, celui-ci peut proposer une adaptation de son poste ou l’affectation à un autre poste.

  1. L’ancien principe : l’examen médical A. Pour qui et quand ?

L’employeur qui recrute un salarié doit organiser un examen médical d’embauche. La demande de visite médicale d’embauche est effectuée par l’employeur au moment de remplir la déclaration unique d’embauche.

Tout au long de sa carrière dans l’entreprise, le salarié bénéficie de visites médicales périodiques par le médecin du travail. En principe, la visite médicale périodique a lieu au moins tous les 2 ans. Pour les salariés soumis à une surveillance médicale renforcée, le médecin du travail est juge des modalités de cette surveillance, celle-ci devant comporter au moins un ou des examens médicaux selon une périodicité ne pouvant dépasser 2 ans.

  1. Déroulé de l’examen

L’examen médical est destiné :

  • –  à vérifier le maintien de l’aptitude du salarié au poste de travail occupé ;
  • –  et à l’informer sur les conséquences médicales des expositions au poste

de travail et du suivi médical nécessaire.

À l’issue de l’examen, le médecin établit le dossier médical du salarié, qui sera complété après chaque examen médical ultérieur, et une fiche médicale d’aptitude.

III. Résumé des obligations de l’employeur en matière de suivi médical

À tout moment, un examen médical peut être demandé par l’employeur, la salarié ou le médecin du travail. En plus de cela, l’employeur est tenu de mettre en place :

  1. La visite d’information et de prévention

L’employeur a pour obligation de demander la tenue d’une visite d’information et de prévention lors de l’embauche. Il le fait lors de la Déclaration Préalable à l’Embauche. Il doit veiller à ce que la visite soit effectivement réalisée. Pendant la suite de l’exécution du contrat, il doit demander la tenue de ces visites selon la périodicité définie par le médecin du travail.

  1. Le suivi individuel adapté

Tout travailleur dont l’état de santé, l’âge, les conditions de travail ou les risques professionnels auxquels il est exposé le nécessitent bénéficie d’un suivi médical adapté, selon une périodicité fixée par le médecin du travail et qui ne peut pas excéder 3 ans. Sont notamment visés :

  • les travailleurs de nuit, qui bénéficient de la visite d’information et de prévention préalablement à leur affectation sur le poste et pour lesquels le médecin du travail peut prescrire des examens médicaux spécialisés complémentaires à la charge de l’employeur
  • les jeunes de moins de 18 ans, qui bénéficient de la visite d’information et de prévention préalablement à leur affectation sur le poste
  • les travailleurs handicapés ou déclarant, lors de la visite d’information et de prévention, percevoir une pension d’invalidité attribuée par un régime de protection sociale obligatoire : ils sont orientés sans délai vers le médecin du travail qui peut préconiser des adaptations du poste de travail
  • les femmes enceintes, ayant accouché ou allaitantes, qui peuvent à tout moment, si elles le souhaitent, être orientées vers le médecin du travail.

Si le médecin du travail est informé et constate que le salarié est affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, ou celles de ses collègues ou de tiers évoluant dans l’environnement immédiat de travail, l’intéressé bénéficie sans délai du suivi médical renforcé exposé plus bas.

  1. Le suivi individuel renforcé

Tout travailleur affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé, sa sécurité, celles de ses collègues ou de tiers évoluant dans l’environnement immédiat de travail bénéficie d’un suivi individuel renforcé de son état de santé.

Un examen médical d’aptitude est effectué par le médecin du travail préalablement à l’affectation sur le poste. Il remplace la visite d’information et de prévention. Cet examen a notamment pour objet de vérifier que le salarié est médicalement apte au poste auquel il doit être affecté, et à défaut de proposer des adaptations ou l’affectation à d’autres postes. A l’issue de cet examen, le médecin du travail délivre un avis médical d’aptitude ou, le cas échéant, d’inaptitude physique, qui est versé au dossier médical du salarié. Le salarié est revu par le médecin du travail selon une périodicité que ce dernier détermine, et qui ne peut pas excéder 4 ans. Une visite intermédiaire est effectuée par un membre de l’équipe pluridisciplinaire au plus tard 2 ans après l’examen pratiqué par le médecin du travail.

Le chef d’établissement a l’obligation de dresser la liste des postes de travail qui présentent des risques pour la santé et la sécurité des salariés, après avis du médecin du travail et du CHSCT ou, à défaut, des délégués du personnel. L’inscription d’un poste sur la liste est motivée. La liste est mise à jour tous les ans. Elle est transmise au service de santé au travail, et tenue au service de la Direccte et des services de prévention des organismes de Sécurité sociale. Si aucun des postes de travail de l’établissement ne présente de risques particuliers pour la santé et la sécurité des salariés, un état « néant » sera établi après avis du CHSCT et du médecin du travail.

Deux catégories de postes de travail doivent ainsi figurer sur la liste établie par le chef d’établissement dans le cadre de la définition des postes à risque (C. trav., art. R. 4624-23) :

  • –  Les travaux dangereux et qui nécessitent une certaine qualification (travaux de maintenance, travaux sur machines dangereuses) ou les travaux exposant à certains risques (travaux en hauteur ; produits chimiques tels que benzène, chlorure de vinyle ; substances telles que l’amiante ; nuisances : bruit – niveau sonore supérieur à 85 dB (A) en moyenne quotidienne ou niveau de crête supérieur à 135 dB -, vibrations).
  • –  Les travaux pour lesquels une formation particulière ou suivi médical est prévue par la réglementation : c’est le cas pour les postes de caristes (C. trav., art. R4323-56).

La liste de l’entreprise peut également être établie après analyse du rapport annuel présenté au CHSCT dressant le bilan de la situation générale de l’établissement en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. Devraient également, par extension, figurer sur la liste les postes de travail ayant été à l’origine d’un accident du travail, d’une maladie professionnelle, ou d’incidents répétés.

  1. Visite médicale de préreprise

Le salarié en arrêt de travail de plus de 3 mois bénéficie d’une visite médicale de préreprise organisée par le médecin du travail à l’initiative du médecin traitant, du médecin conseil des organismes de sécurité sociale ou du salarié. Au cours de l’examen de préreprise, le médecin du travail peut recommander des aménagements et adaptations du poste de travail, des préconisations de reclassement ou des formations professionnelles.

Dès que l’employeur a connaissance de la date de la fin de l’arrêt de travail, il saisit le service de santé au travail qui organise l’examen de reprise le jour de la reprise effective du travail par le travailleur, et au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent cette reprise.

  1. Visite médicale de reprise

A la différence de l’examen de préreprise, l’examen de reprise est donc organisé à la diligence de l’employeur. L’examen de reprise a pour objet :

  • –  De vérifier si le poste de travail que doit reprendre le travailleur ou le poste de reclassement auquel il doit être affecté est compatible avec son état de santé
  • –  D’examiner les propositions d’aménagement ou d’adaptation du poste repris par le travailleur ou de reclassement faites par l’employeur à la suite des préconisations émises le cas échéant par le médecin du travail lors de la visite de préreprise
  • –  De préconiser l’aménagement, l’adaptation du poste ou le reclassement du travailleur

Tout salarié doit passer une visite médicale de reprise de travail au terme d’un arrêt de travail lié à :

  • –  un arrêt maladie ou un accident d’origine non professionnel d’au moins 30 jours,
  • –  la fin d’un congé de maternité,
  • –  un arrêt d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail,
  • –  une maladie professionnelle (quelle que soit sa durée).

A l’issue de l’examen, le médecin rend un avis d’aptitude, ou bien le cas échéant d’inaptitude, avec ou sans réserves.

En cas d’arrêt pour accident du travail de moins de 30 jours, l’employeur doit toujours en informer le médecin du travail afin qu’il puisse apprécier, notamment, l’opportunité d’un nouvel examen médical ou préconiser des mesures de prévention.

  1. L’avis médical et la nouvelle procédure de contestation de l’avis médical A. L’attestation de suivi et l’avis médical

A l’issue de la visite médicale, le professionnel de santé délivre une attestation de suivi. Il n’y a plus d’avis d’aptitude à délivrer. Si, au contraire, il estime que le salarié n’est plus apte au travail, diriger le salarié vers le médecin du travail qui délivrera le cas échéant un avis d’inaptitude. Dans ce cas, la procédure relative à l’inaptitude devra être mise en place (reclassement, licenciement). Il est possible pour le médecin de délivrer un avis d’aptitude avec réserves, dans lequel il propose une adaptation de son poste ou l’affectation à un autre poste

  1. Contestation médicale de l’avis

Auparavant, la contestation médicale de l’avis d’inaptitude était faite par l’employeur devant l’Inspection du travail dans un délai de 2 mois. Cette procédure est totalement modifiée : il s’agit désormais de contester l’avis devant le Conseil de Prud’hommes dans un délai de 15 jours, saisi en la formation des référés. La nouvelle procédure est la suivante :

  1. Le Conseil des Prud’hommes est saisi en référé soit par une requête, soit par la présentation volontaire des parties, soit par acte d’huissier de justice (R 1455-9 du Code du travail), pour demander la désignation d’un médecin-expert dans un délai de 15 jours après la notification de l’avis litigieux. Une expertise sera alors menée par ce médecin-expert.

Au besoin, le Conseil pourra demander à l’Inspection du travail de fournir un éclairage sur la situation du salarié à travers une consultation effectuée par le médecin inspecteur du travail relative à cette contestation médicale. Cette consultation ne remplace pas l’expertise du médecin-expert que le Conseil a désigné, mais n’a vocation qu’à fournir un éclairage supplémentaire. L’expertise ainsi menée n’est pas gratuite : les frais d’expertise seront réglés par les parties à la fin de la procédure. Chacune doit verser une provision sur la rémunération du médecin-expert, qui est consignée le temps de la procédure. La contestation de ne doit porter que sur des éléments de nature médicale. On rappelle que pour que les voies et délais de recours soient opposables, ils doivent être présents dans les avis et mesures émis par le médecin du travail.

  1. Le demandeur informe le médecin du travail de la saisine du Conseil. Aucune disposition ne prévoit dans quel délai cette information doit avoir lieu, ni les conséquences d’une éventuelle omission sur la suite de la procédure. On peut penser que cette information doit être faite en amont, ou au plus tard en même temps que la saisine.

Telle information permet au médecin du travail d’être entendu par le médecin- expert désigné par le Conseil (R 4624-45 du Code du travail). Le médecin- expert peut demander au médecin du travail la communication du dossier médical du salarié.

Cette information n’a pas pour conséquence de faire du médecin du travail une partie au litige, qui oppose uniquement l’employeur et le salarié.

  1. Le Conseil rend l’ordonnance en référé. Aucune disposition ne précise le délai dans lequel le Conseil doit désigner le médecin-expert, ni celui dans lequel ce dernier doit rendre sa décision.
    La décision de la formation de référé se substitue aux éléments de nature médicale qui ont justifié les avis, propositions, conclusions écrites ou indications du médecin du travail faisant l’objet du recours (R 4624-45 du Code du travail). Ainsi, la formation de référé du conseil de prud’hommes statue sur le recours, au vu des conclusions du médecin expert. Il semble donc qu’elle ne soit pas liée par l’avis de ce dernier, qui aurait seulement voix consultative.

Le conseil de prud’hommes est habilité à annuler l’avis du médecin du travail pour y substituer sa décision. Il devrait donc être en mesure d’annuler ou de préciser un avis médical. Il serait par exemple fondé à annuler un avis d’inaptitude physique pour le remplacer par un avis d’aptitude assorti de réserves.

  1. Le reste de la procédure est régi par les articles R 1455-1 et suivants, à défaut de précision de la loi. A ce titre, il est possible de faire appel dans un délai de 15 jours. L’exécution provisoire peut être demandée.
  2. Contestation non-médicale de l’avis

Faut-il appliquer la même procédure? La loi ne fournit pas de solution. La jurisprudence non plus, pour l’instant.

Il semble toutefois qu’il faille présenter la contestation par la nouvelle procédure (au CPH en référé) même lorsque ce n’est pas une contestation médicale, car l’ancienne procédure de contestation devant l’Inspecteur du travail a été abrogée et n’est donc plus fondée. Elle serait alors irrecevable car l’article L. 4624-1 ne la prévoit plus.

Si la contestation est portée conformément à la nouvelle procédure, il est possible que la formation de référé renvoie l’affaire devant le bureau de jugement, avec l’accord des parties et après une tentative de conciliation (R 1455-8 du Code du travail), dès lors qu’elle s’aperçoit qu’il ne s’agit pas d’une contestation médicale, mais plutôt d’une contestation au fond.

 

Share this article

Facebook
Twitter
LinkedIn
Email
WhatsApp

Sign up to our newsletter

Thank you!

Skip to content