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LA REPRISE DE L’ACTIVITÉ VA-T-ELLE PASSER PAR DES ACCORDS DE PERFORMANCE COLLECTIVE ?

accord de performance collective

Après deux mois d’une activité économique au ralenti, voire à l’arrêt total pour certaines entreprises, avec un nombre important de salariés au chômage partiel, les entreprises doivent désormais organiser les conditions de la reprise.

Si pour l’heure, la plupart d’entre elles sont encore dans l’expectative, elles ont déjà entamé des réflexions sur les leviers à activer pour passer le cap de la crise et faire face aux mois à venir qui s’annoncent difficiles.

Parmi les dispositifs susceptibles d’être mobilisés pour endiguer au maximum les conséquences économiques de la crise sanitaire, l’accord de performance collective pourrait tirer son épingle du jeu.

En conciliant souplesse et engagements liés à l’emploi, cet outil qui a pris le relais en 2017 des autres accords emploi pourrait s’accorder à la situation de certaines entreprises.

Ne nécessitant pas de justifier de l’existence de difficultés économiques, l’accord de performance collective peut être utilisé pour gérer des réorganisations d’entreprise comme des déménagements de sites par exemple.

Surtout, les ordonnances de 2017 ont levé un verrou de taille pour les entreprises en qualifiant le licenciement des salariés qui refuseraient de se voir appliquer l’accord de sui generis et non plus d’économique.

La crise sanitaire pourrait donner lieu à un nouveau rebond de ce type d’accords.

Un outil idoine pour la reprise d’activité ? 

L’ensemble des spécialistes interrogés voient dans l’accord de performance collective un outil adapté pour faire face à cette nouvelle crise.

L’occasion selon eux de faire des accords de performance collective un mode d’organisation et d’adaptation de l’entreprise.

L’accord de performance collective permet d’adapter les effectifs au niveau d’activité anticipé dans les prochains mois et présente l’avantage d’une organisation à froid, conjoncturelle.

Il est alors possible de faire du sur-mesure en matière de durée du travail et de rémunération, service par service.

Il permet d’activer les deux principaux leviers de la gestion des RH.

Surtout, ils ne rendent pas les changements irréversibles.

Jusqu’à présent, la rédaction de beaucoup d’accords de performance collective étaient liés au déménagement d’entreprise. Ils vont sans doute désormais aborder la question de la baisse des rémunérations, la suppression de primes et l’aménagement du temps de travail avec des clauses de retour à meilleure fortune.

Jusqu’alors les accords de performance collective étaient surtout de l’ingénierie sociale.

Dans le contexte actuel de crise, la signature de ce type d’accord ne sera possible que si les parties ont la conviction que c’est du gagnant-gagnant.

Pour les entreprises, ce dispositif permet de réduire des coûts.

Pour les syndicats et les salariés, cet accord évite ou réduit le nombre de licenciements.

Le principal obstacle est la remise en cause des acquis qui peut être difficile à accepter. »

Une réflexion à mener au cas par cas

Mais l’accord de performance collective ne s’adapte pas forcément à toutes les situations.

Ainsi, l’accord de performance collective est déconseillé à une entreprise dont l’ensemble des salariés travaillent sur la base des 35 heures si l’objet de cet accord est uniquement d’adapter à la baisse le temps de travail à une diminution d’activité limitée dans le temps.

Un tel accord amènerait les salariés à se retrouver en dessous des 35 heures avec toute la rigidité du temps partiel à mettre en place.

En revanche, s’agissant d’une entreprise dont une partie des salariés travaille au-delà de 35 heures, il peut y avoir une vraie opportunité de signer un accord de performance collective afin de baisser le volume de travail pendant quelques mois pour faire face à la crise ».

C’est aussi un bon outil car, parfois, sans s’en rendre compte, les entreprises ont contractualisé un certain nombre d’éléments ; un tel accord permet un réexamen au cas par cas.

Un dispositif qui présente des avantages par rapport à d’autres 

Les accords de performance collective ne sont pas les seuls outils à la disposition des entreprises pour faire face à cette crise mais ils présentent des avantages certains en comparaison d’autres dispositifs.

La rupture conventionnelle collective, également créée en 2017, ne remporte pas un franc succès auprès des experts interrogés pour traverser la crise actuelle.

Il ne s’agit pas d’un outil assez souple pour délimiter les contours de la cible de l’accord.

Or, aujourd’hui, l’exercice le plus important consiste à penser demain et à identifier les compétences dont on aura besoin.

Par ailleurs, la période n’y est pas favorable car il y a peu de chances que les salariés se précipitent vers un départ volontaire en raison de la situation de l’emploi.

De manière générale, tous les outils de restructuration ne sont pas adaptés à une période incertaine où les entreprises doivent garder leurs compétences, comme elles l’ont fait en recourant à l’activité partielle.

Il peut être plus facile de signer un plan de départs volontaires ou un plan de sauvegarde de l’emploi mais la situation sur le marché du travail est bien différente d’il y a quelques mois.

Les RH vont devoir convaincre les directions que ce type d’accord est préférable à des départs avec des chèques importants.

Mettre en place des licenciements, c’est prendre le risque de se priver de compétences en cas de rebond de l’activité et mettre des salariés au chômage pendant une crise qui s’annonce très dure.

Il existe toutefois une autre possibilité plus classique : le toilettage de l’accord d’entreprise sur la durée et l’aménagement du temps de travail.

L’accord de performance collective n’est pas forcément un passage obligé ; il est également possible de réviser son accord sur l’aménagement du temps de travail et ce, d’autant que beaucoup d’entreprise restent régies par de vieux accords d’entreprise 35 heures qui ne sont parfois plus en phase avec la pratique de l’entreprise.

A une différence toutefois, l’accord de performance collective permet de passer outre les clauses du contrat de travail.

La question se pose de savoir si l’entreprise a besoin, systématiquement, d’un accord de performance collective. Il est aussi possible de réviser l’accord collectif sur le temps de travail.

Garder à l’esprit des points de vigilance

Attention toutefois à bien avoir en tête certains écueils lors de la conclusion d’un accord de performance collective.

Le premier, de taille, est le respect du principe d’égalité applicable à tout accord collectif.

Moduler la baisse de la rémunération peut être risqué. L’accord sera scruté avec d’autant plus de sévérité qu’on touche au salaire.

Il semble toutefois difficile de mettre en œuvre un tel mécanisme tant en termes de négociation que de climat social, sauf à agir sur les rémunérations variables ou les bonus pour des catégories particulières de salariés dans une logique de solidarité.

Cela dépend du diagnostic. Il faut étudier la question de l’équité externe et évaluer si les pratiques et le pack de rémunération de l’entreprise sont corrélées au marché ou non.

Peaufiner la communication interne

Surtout, et tous les spécialistes interrogés le rappellent, il ne peut pas y avoir de conclusion d’un accord de performance collective sans une communication transparente et détaillée auprès des organisations syndicales et des salariés.

C’est la condition sine qua non pour obtenir l’adhésion la plus large.

Il faut faire en sorte que les partenaires sociaux s’approprient le sujet.

La communication interne est plus importante que pour un plan de sauvegarde de l’emploi car l’impact sur le contrat de travail n’est pas le même.

C’est tout à la fois de la communication interne et du dialogue social dans une période compliquée, avec des délais courts et des réunions souvent en visioconférence.

Son succès dépend de l’état du dialogue social. Lorsque celui-ci est dégradé, ce n’est pas le meilleur outil.

En revanche, lorsqu’il existe dans l’entreprise un dialogue social constructif et collaboratif, l’accord de performance collective est adapté.

Ce dispositif peut toutefois revivifier un dialogue social en berne.

Si la démarche est couronnée de succès, ce sera gagnant-gagnant pour tout le monde.

A cet égard, la rédaction du préambule de l’accord ne devra pas être bâclée.

Il convient d’expliquer les objectifs poursuivis, justifier les différences entre certains salariés et expliquer qu’il s’agit de préserver l’emploi à moyen terme.

Par ailleurs, l’accord de performance collective peut aussi être un outil de communication des DRH vis-à-vis de leurs directions.

Il permet aux DRH de justifier le management des coûts d’équipes en sous-activité sans pour autant se séparer des salariés et les incitations financières pour les business units dont dépend l’activité pendant la crise.

Toutefois, il faudra prévoir une compensation financière pour tous in fine.

Ne pas oublier les efforts des dirigeants

Qui dit accord de performance collective, dit efforts de tous, même des dirigeants.

Y insérer une clause de retour à meilleure fortune semble être le minimum indispensable.

Il faut faire preuve de loyauté à l’égard des salariés.

La clause de retour à meilleure fortune présente un caractère rassurant et c’est ce qui peut permettre à la négociation d’aboutir surtout dans une logique d’accord à durée indéterminée.

S’agissant des éventuels efforts des dirigeants, ce qui peut constituer un autre élément de la négociation, la question ne sera pas abordée de la même façon dans les TPE-PME et les grandes entreprises.

Dans les petites et moyennes entreprises, les dirigeants seront déjà vraisemblablement impactés dans leur structure de rémunération par la situation de l’entreprise.

Toutes ces mesures vont contribuer à faciliter l’acceptabilité sociale.

La question des dividendes, même si elle ne relève pas des partenaires sociaux, devra être mise sur la table de négociation si une baisse ou une suppression des dividendes a été actée par les actionnaires

Cumuler accord de performance collective et activité partielle ?

Les entreprises en difficulté ont essayé de contenir les effets de la crise pendant deux mois en activant la procédure d’activité partielle.

A compter du 1er juin, les conditions de prise en charge par l’Etat vont être revues à la baisse pour les entreprises.

L’accord de performance collective pourrait prendre le relai afin de réaliser les économies nécessaires.

Se pose toutefois la question d’une éventuelle conciliation des deux processus.

Sur le papier, il n’y a pas d’incompatibilité mais si ce choix est fait, il faut le prendre en compte dans le contexte de la négociation.

L’un va succéder à l’autre.

Pendant la négociation, il sera plus simple de démontrer que l’entreprise a utilisé jusqu’au bout l’activité partielle et, l’Etat se désengageant, il est désormais nécessaire de trouver une autre solution.

Les semaines et les mois à venir vont être décisifs dans la prise de décision.

Les choses se décideront à la rentrée, le temps de laisser passer une phase d’observation.

Si certaines entreprises feront le choix d’accords de performance collective, d’autres devraient directement engager un plan de sauvegarde de l’emploi.

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