Avec la mise en place définitive du CSE au 1er janvier 2020, il convient de revenir sur la dévolution des budgets des ex-CE.
Quelles sont les démarches préconisées pour organiser le transfert du patrimoine du CE ?
- Un diagnostic comptable préalable
A notre sens, il est important de pouvoir établir, non seulement un arrêté comptable, mais également un audit des contrats et obligations.
Cela permet d’établir précisément le patrimoine à transférer, notamment tous les biens immobiliers, les biens mobiliers : ordinateurs, logiciels, vidéoprojecteur, matériel de bureau, les stocks (billetterie chèques vacances…), les obligations et droits (contrats en cours (assurance, location, prestataires divers : photocopie, machine à café…), les sommes dues par les salariés (participation aux ASC…), le solde des subventions dues par l’entreprise, les prêts et secours…
En effet, la connaissance précise de l’état du patrimoine mais aussi la nature des éléments qui le composent, sont nécessaires à sa transmission dans les règles.
Idéalement, nous préconisons sur le volet comptable un arrêté comptable le plus proche de la date de mise en place du CSE, afin que le CE lors de sa dernière réunion puisse se prononcer sur ce qui est transféré, et que le CSE lors de sa première réunion puisse clairement apprécier ce qu’il reçoit en termes d’actifs et de passifs.
- La mise en place pratique
Dans les cas les plus simples, le CSE votera un rapport de transfert, après que le CE ait précisé lors de sa dernière réunion l’affectation des biens dont il dispose sur la base d’un état des lieux comptables et juridiques clair et récent, ce qui validera l’opération entre CE et CSE.
Dans les cas plus complexes, le CSE devra voter les décisions relatives à des partages de patrimoine en relation avec les différents CSE concernés.
Demeure la question de la possibilité de changer « l’affectation » du patrimoine transféré.
Cela ne nous semble pas permettre de décider de changements d’affectations autorisant le passage du budget ASC au budget fonctionnement et vice versa.
En revanche, voter dans un même budget, un changement de politique semble envisageable (fonds destinés par le CE à l’achat de place cinéma, que le CSE déciderait d’employer pour un voyage).
Quel est le sort des contrats du CE (agence de voyage, prestataire photocopie, machine à café, site web, assureur…) ?
Les ordonnances précisent que l’ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes des CE, CCE, Comités d’établissement, CHSCT et DUP est transféré.
Il s’agit donc bien de l’ensemble du patrimoine, lequel ne se limite pas aux comptes bancaires.
On y retrouve notamment tous les biens mobiliers : ordinateurs, logiciels, vidéoprojecteur, matériel de bureau, les stocks (billetterie, chèques vacances…), etc.
S’y trouvent également les obligations et droits, à titre d’exemple : les contrats en cours (assurance, location, prestataires divers,..) les sommes dues par les salariés au titre des ASC le solde des subventions dues par l’entreprise, les prêts et secours, etc.
Des difficultés pratiques peuvent apparaître en cas de changement de périmètres des instances représentatives du personnel.
Dans le cadre du travail d’état des lieux et de revue (cf. 1), il sera utile de déterminer le type de contrat et les obligations afférentes qui pèsent sur le CE et transférées au CSE, ainsi que les conditions de rupture (délais, pénalités…).
Quel est le sort des contrats de travail et des salariés du CE?
Les contrats de travail des salariés du CE sont concernés également : ils sont donc transférés et le CSE a vocation à devenir l’employeur des salariés concernés.
A périmètre constant (périmètre CE = périmètre CSE) cela ne posera pas de difficulté. Si le CSE n’est pas immédiatement mis en place (procédure de contestation des élections…), le CE survivra pour les « besoins de sa liquidation » et « expédiera les affaires courantes », les salariés ne se retrouvant pas sans employeur.
Toute autre est la situation en cas de nouveaux établissements et/ou de leur redécoupage.
Quel sort est réservé à ces contrats de travail ? Et donc, aux salariés concernés. En effet, lequel des CSE d’établissement voudra « reprendre » le contrat de travail du CE employeur disparu ?
A notre sens, il convient d’anticiper au mieux ces difficultés, ce qui sera d’autant plus possible lorsque l’accord de mise en place du CSE aura été négocié en amont des élections.
On peut alors imaginer, par exemple, que les CSE d’établissements prévoient de « partager » le ou les postes existants devenant ainsi co-employeurs.
Dans une même logique, on peut penser mettre en place des conventions de transfert tripartites entre le CE, le salarié et les CSE concernés, ces derniers signant cette convention prévue par l’accord post élections.
Comment se répartit le patrimoine du CE si apparaissent des établissements et des CSE d’établissements ?
Les ordonnances ne donnent aucune règle.
Il est possible – et peut-être opportun – d’en définir les principes (répartition à la masse salariale/aux effectifs/combinaison des 2) dans le cadre de l’accord de mise en place du CSE ou d’un accord distinct.
On peut également imaginer que dans le cadre du transfert, le CE pourra « répartir » son patrimoine en définissant une clef de répartition (nombre de salariés dans chaque périmètre d’établissement, masse salariale…).
Le risque serait toutefois que les CSE d’établissement reviennent sur ce choix par un accord commun, voire – au pire – via une procédure judiciaire.
Comment faire pour finaliser le transfert du patrimoine si, à la date de fin de la mandature du CE, ce travail n’est pas terminé ?
Le transfert de patrimoine doit se faire au moment du passage entre CE et CSE mais opérationnellement certaine démarches seront nécessaires (changement des mandataires des comptes bancaires et de leur dénomination, courriers aux co-contractants, démarches notariales pour les biens immobiliers…).
Nous préconisons que le CE, avant sa dernière réunion désigne une commission au transfert, laquelle aurait la charge de gérer les affaires courantes et de mener à bien les opérations de transfert (préparer un rapport de transfert avec l’expert-comptable et l’avocat, le présenter au CSE…).
Une autre solution plus légère, adaptée au CE de taille plus petite, peut-être de prévoir la nomination de mandataires chargés de la gestion du CSE pendant cette période transitoire.
Si le transfert ne concerne que des dettes, le CSE peut-il refuser le transfert ?
Il ne nous semble pas que le CSE puisse refuser ce transfert.
En effet, le transfert est « de plein droit » et « en pleine propriété ». Il s’impose à toutes les parties (CE / CSE /employeur).
Cela signifie également que le CE pourrait transférer un patrimoine composé uniquement de dettes, que le CSE ne pourrait refuser.
Le nouveau texte utilise le terme « affectation » et prévoit la possibilité pour le CSE de décider d’une « affectation différente » de celle choisie par le CE. Concrètement, que signifie cette expression ?
Si le transfert du patrimoine est de droit entre le CE et le CSE, la rédaction de l’ordonnance prête à interrogations en ce qui concerne l’affectation des budgets.
A notre sens, la notion « d’affectation » peut renvoyer à différentes hypothèses :
– soit à la décision du CE de définir une destination des biens (ASC / fonctionnement) dans le cadre du transfert et/ou à la décision du CSE de changer cette destination.
Exemple : un CE décide initialement que les réserves sur un budget (exemple : budget de fonctionnement) soient transférées pour tout ou partie sur le budget des activités sociales et le CSE décide de changer cette destination considérant que ces réserves doivent aller sur le budget fonctionnement. Rappelons que dans le cadre des dévolutions, il appartient au comité qui « hérite », de déterminer la répartition de l’apport entre chacune des sections (AEP et ASC).
Considérer que le législateur a étendu le principe applicable aux dévolutions aux situations de transferts en CSE, tendrait à valider un principe de fongibilité des réserves et des budgets, ce qui en tant que tel n’est pas prévu par la loi.
Nous restons sur ce point dans l’attente de précisions et, par prudence à ce stade, nous ne considérons pas que les termes « décider d’affectations différentes » autorisent expressément le CSE à modifier les affectations entre fonctionnement et ASC, en transférant une partie des réserves d’un budget à l’autre.
En revanche, il ne peut s’agir d’affectation des obligations qui de par leur nature relèvent, de par la loi, de l’un ou de l’autre des budgets (le contrat passé avec une agence de voyage relèvera nécessairement des activités sociales et culturelles).
– soit, dans le cadre d’une structure avec un niveau central et des établissements, à la décision du CE d’affecter selon telle ou telle clef de répartition (effectifs, masse salariale…) la part de patrimoine du CE qui revient aux différents CSE d’établissement.
Le texte n’envisage cependant pas cette configuration.
Ainsi, les ordonnances n’étant pas plus précises, il est difficile de savoir ce que signifie le fait pour le CSE de pouvoir changer cette « affectation » décidée initialement par le CE.
Le transfert du patrimoine du CE au CSE permet-il de remettre en question le taux du pourcentage de calcul du budget ASC en vigueur jusqu’alors ?
Les ordonnances ne le prévoient pas.
A notre sens, il n’y a pas de raison que dans une même entreprise, le changement d’instance représentative permette une telle remise en question.
Antérieurement, lorsque des élections intervenaient y compris avec des changements de périmètres (mise en place de comités d’établissements…), le pourcentage de calcul du budget ASC en vigueur dans l’entreprise n’en était pas modifié.
Pour autant, on ne peut exclure la possibilité pour les employeurs de tenter de défendre cette possibilité, considérant que dans la mesure où il y a un transfert de patrimoine prévu par la loi, il y a mise en place d’une nouvelle personne morale / nouvelle instance représentative du personnel.
Cette opinion peut à notre sens être combattue sur le terrain de la permanence de la collectivité de travail.
L’entreprise perdurant, le taux appliqué à la première mise en place de la première instance du personnel, doit demeurer.
Autre argument qui pourrait être avancé par l’employeur : lorsque le pourcentage aura été défini par accord collectif, le fait que les accords de fonctionnement des IRP tombent avec la mise en place du CSE.
Pour plus de sécurité, ce point est en tout cas à notre sens à anticiper lors de l’accord de mise en place du CSE négocié en amont des élections, sauf à faire valoir la règle de la meilleure des 3 dernières années.
Quelle est à désormais l’assiette de calcul des budgets ?
La masse salariale brute sert d’assiette de calcul de la subvention de fonctionnement versée au CSE.
La définition jusqu’alors issue de jurisprudence de la Cour de cassation prenait comme assiette le compte comptable 641 auquel un certain nombre de sommes devaient être retirées.
Les ordonnances précisent désormais que l’assiette de calcul s’entend comme « la masse salariale brute constituée par l’ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions des articles L.242-1 du Code de la sécurité sociale ou l’article L.741-10 du Code rural et de la pêche maritime, à l’exception des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée ».
Cette nouvelle règle s’applique à la mise en place du CSE.
Certaines sommes seront amenées à sortir du calcul telles que les sommes correspondant aux indemnités de rupture d’un CDI ce qui aura comme conséquence de baisser les subventions allouées aux CSE en les privant d’une base plus favorable, à heure où de nouvelles charges risquent de peser (enjeu des expertises).
La Cour de Cassation, par deux arrêts du 7 février 2018 a d’ores et déjà appliqué comme assiette de calcul, la déclaration sociale nominative DSN (ex DADS) et non plus le compte 641 pour le calcul des budgets du CEIl serait alors opportun de pouvoir réaliser des projections sur les futurs budgets, le compte 641 incluant des dépenses non soumises à cotisations sociales.
En effet, les indemnités versées à l’occasion de la rupture des contrats CDI intègrent-elles les indemnités de congés payés, de préavis non effectuées ?
Cela reste à préciser.
Est-il possible de transférer des fonds d’un budget à l’autre dans le cadre du CSE ?
Les ordonnances Macron ont prévu la possibilité pour le CSE d’opérer un transfert de l’excédent de son budget de fonctionnement à la subvention destinée aux activités sociales et culturelles, et vice versa.
Pour rappel, la décision d’un tel transfert est prise par une délibération des membres de la délégation du personnel du CSE (à la majorité des élus titulaires présents).
Toutefois, des limites au transfert sont connues à ce jour :
– transfert possible de l’un vers l’autre des budgets mais pour le seul reliquat annuel (le résultat de l’exercice donc, pas les réserves),
– des ASC vers le Fonctionnement : 10 % de l’excédent annuel de ce budget peut être transféré au budget de fonctionnement ou à des associations,
– du Fonctionnement aux ASC : la loi de ratification prévoit le plafonnement du transfert de l’excédent annuel du budget de fonctionnement vers le budget des activités sociales et culturelles. Un décret à paraître devra nous éclaircir sur la part du résultat qu’il sera possible de transférer.
– Peut-on réserver une partie du budget du CSE à la Commission SSCT ?
Les décisions de l’instance sont souveraines et, à partir du moment où le vote se fait valablement (à la majorité des élus titulaires présents), rien ne l’empêche.
Il faut conserver en mémoire que la Commission Santé Sécurité Conditions de Travail demeure une commission du CSE qui n’a pas la personnalité morale et ne dispose ni de la prérogative de voter une expertise, ni de celle de rendre un avis.
Une nécessité désormais : établir un budget prévisionnel
Avant de décider des transferts de reliquats, notamment du Fonctionnement vers les ASC, les élus doivent à notre sens être vigilants et établir des budgets prévisionnels y compris pour la subvention de fonctionnement comme cela se pratiquait pour les ASC compte tenu des demandes d’expertises qui pourraient être faites et qui doivent, selon les cas, être prises en charge à hauteur de 20% par l’instance.
Ne pas y réfléchir c’est, à notre sens, s’exposer au risque de voir se vider les prérogatives économiques ou en matière de santé et prévention de tout sens et portée.
Pour les coûts des expertises prises en charge partiellement par le CSE : demander à l’entreprise, qui, elle récupère la TVA, de régler l’intégralité de la note d’honoraires et de ponctionner ensuite sur les versements futurs. L’économie est de 20% du coût à supporter.