Lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements dans le cadre d’un document unilatéral, après consultation du CE ou, s’il est mis en place du CSE.
Ces critères prennent notamment en compte :
- les charges de famille, en particulier celles des parents isolés,
- l’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise,
- la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés,
- les qualités professionnelles appréciées par catégorie.
L’employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères (art. L. 1233-5 du Code du travail).
Le Conseil d’Etat a jugé que l’employeur ne peut omettre l’un des critères légaux ou neutraliser l’un d’eux en lui attribuant la même valeur pour tous les salariés, sauf à démontrer être dans l’impossibilité matérielle de pondérer ce critère (CE., 1erfévrier 2017, n° 387886).
En l’espèce, les juges ont estimé que le fait pour l’employeur de ne pas disposer des évaluations antérieures des salariés ne constituait pas une impossibilité matérielle empêchant de pondérer le critère des qualités professionnelles.
Dans la première affaire, l’entreprise était dépourvue de tout système d’évaluation des salariés.
Lors de l’établissement du document unilatéral fixant le PSE, l’employeur a pris en compte la prime d’assiduité versée aux salariés pour pondérer le critère des qualités professionnelles.
Cet indicateur était corrigé de façon à ne pas pénaliser les salariés absents pour des motifs légaux (AT-MP, congés maternité).
Ce document unilatéral a été homologué par la DIRECCTE.
Le CE de l’entreprise et plusieurs salariés ont saisi la juridiction administrative pour solliciter l’annulation de cette homologation pour absence de prise en compte des qualités professionnelles.
La Cour administrative d’appel et le Conseil d’Etat ont rejeté cette demande estimant que ce critère avait bien été pris en compte au travers de l’indicateur tiré du montant de la prime d’assiduité.
Dans la seconde affaire, le document unilatéral prenait en compte les absences injustifiées des salariés au cours des deux dernières années pour pondérer les qualités professionnelles.
Après homologation du document unilatéral par la DIRECCTE, plusieurs salariés ont saisi la juridiction administrative pour demander son annulation.
Ils reprochaient à l’employeur d’avoir pris en compte uniquement les absences injustifiées pour mesurer le critère des qualités professionnelles alors qu’il disposait, depuis plusieurs années, d’un système d’évaluation professionnelle des salariés.
La Cour administrative d’appel, suivie par le Conseil d’Etat, leur a donné raison considérant que le seul recours au nombre d’absences injustifiées ne permettait pas, en l’espèce, de prendre en compte les qualités professionnelles des salariés.
Il en résulte que la décision d’homologation a été annulée.
Lorsque l’entreprise dispose d’un système d’évaluation professionnelle, l’employeur doit en tenir compte, a minima, pour mesurer le critère des qualités professionnelles.
CE, 22 mai 2019, n° 413342 et 418090