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LES REUNIONS DU CSE EN VISIOCONFERENCE : mode d’emploi

Étape préliminaire : sécuriser les modalités de recours à la visioconférence

Avant les dérogations apportées par la crise sanitaire, le législateur avait renvoyé à l’accord d’entreprise le soin de fixer les modalités de recours à la visioconférence.

En l’absence d’accord, ce recours est limité à trois réunions par année civile.

Un décret détermine d’ailleurs les conditions dans lesquelles le CSE peut, dans ce cadre, procéder à un vote à bulletins secrets.

« Art. D. 2315-1. – Lorsque le comité social et économique est réuni en visioconférence, le dispositif technique mis en œuvre garantit l’identification des membres du comité et leur participation effective, en assurant la retransmission continue et simultanée du son et de l’image des délibérations.

« Les dispositions prévues au premier alinéa ne font pas obstacle à la tenue de suspensions de séance. 

« Lorsqu’il est procédé à un vote à bulletin secret en application des dispositions de l’article L. 2315-4, le dispositif de vote garantit que l’identité de l’électeur ne peut à aucun moment être mise en relation avec l’expression de son vote. Lorsque ce vote est organisé par voie électronique, le système retenu doit assurer la confidentialité des données transmises ainsi que la sécurité de l’adressage des moyens d’authentification, de l’émargement, de l’enregistrement et du dépouillement des votes.

« Art. D. 2315-2. – La procédure mentionnée à l’article D. 2315-1 se déroule conformément aux étapes suivantes :

« 1° L’engagement des délibérations est subordonné à la vérification que l’ensemble des membres a accès à des moyens techniques satisfaisant aux conditions prévues à l’article D. 2315-1 ;

« 2° Le vote a lieu de manière simultanée. A cette fin, les participants disposent d’une durée identique pour voter à compter de l’ouverture des opérations de vote indiquée par le président du comité.

Dans le contexte de la crise sanitaire, une première ordonnance du 1er avril 2020 avait déjà autorisé, à titre exceptionnel, sans limite, le recours à la visioconférence après information par l’employeur des membres du CSE, même sans accord.

L’ordonnance n° 2020-1441 du 25 novembre 2020 réactive la possibilité, pendant l’état d’urgence, de recourir de façon illimitée aux réunions du CSE par visioconférence, conférence téléphonique ou messagerie instantanée.

Sont prévues toutefois des exceptions, permettant aux membres du CSE de s’opposer à la réunion à distance lorsque certains sujets sensibles comme le licenciement économique ou l’APLD (activité partielle de longue durée) sont à l’ordre du jour.

Il convient de revenir sur le dispositif réactivé inchangé et précisons les nouveautés apportées.

Réunions du CSE à distance illimitées pendant l’état d’urgence

Depuis le 27 novembre 2020 (entrée en vigueur de l’ordonnance), et jusqu’à la fin de l’état d’urgence (qui, depuis le 15 février 2021, a été prorogé jusqu’au 1er juin 2021), les réunions à distance sont autorisées pour l’ensemble des réunions du CSE et du CSEC, après que l’employeur en a informé leurs membres.

C’est le cas des réunions par visioconférence, même au-delà de la limite de 3 réunions par an à défaut d’accord, des réunions par conférence téléphonique, ainsi que des réunions par messagerie instantanée (mais, dans ce dernier cas, seulement en cas d’impossibilité de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique ou lorsqu’un accord d’entreprise le prévoit).

Comme pour le premier état d’urgence, l’ordonnance prévoit que les réunions à distance sont autorisées également pour l’ensemble des réunions des instances représentatives du personnel régies par les dispositions du code du travail, après que l’employeur en a informé leurs membres.

Cela vise d’après nous le comité de groupe, le comité d’entreprise européen, le comité de la société européenne, mais aussi les commissions du CSE dont la CSSCT.

Comme pour la première ordonnance d’avril, il nous apparaît que tous les membres du CSE doivent être convoqués, même les suppléants, ainsi que bien sûr les représentants syndicaux.

L’identification des participants étant une condition obligatoire, les règles de suppléance pourront être appliquées en l’absence de titulaires, et les suppléants non-remplaçants remerciés.

Il est également possible d’accepter la participation des suppléants aux réunions dans le contexte particulier de la crise sanitaire.

En outre, faute de disposition contraire, il apparaît que les participants extérieurs doivent également être convoqués le cas échéant (médecin du travail et responsable sécurité, sur les points de l’ordre du jour en rapport avec la santé et la sécurité, inspecteur du travail et agent de la Carsat, de même que les experts du CSE ou le commissaire aux comptes le cas échéant).

Un décret n°2020-1513 en date du 3 décembre 2020 en a fixé les modalités, reprenant à l’identique les modalités du décret n° 2020-419 du 10 avril 2020, lequel prévoyait que :

  • comme pour la visioconférence, le dispositif technique doit permettre l’identification des membres ainsi que leur participation effective. Il convient de noter qu’aucun des dispositifs ne fait obstacle aux suspensions de séance,
  • pour le vote à bulletin secret, le dispositif de vote mis en oeuvre répond aux conditions prévues par l’alinéa 3 l’article D. 2315-1 relatif à la visioconférence (garantie du secret de l’identité et de la confidentialité des données transmises). Il était en outre prévu que le président de l’instance informe ses membres de la tenue de la réunion en conférence téléphonique. Concernant la réunion par messagerie instantanée, le président précise la date et l’heure de son début ainsi que la date et l’heure à laquelle interviendra au plus tôt sa clôture,
  • la réunion par conférence téléphonique se déroule conformément aux étapes prévues à l’article D. 2315-2 relatif au recours à la visioconférence (vérification que l’ensemble des membres a accès à des moyens techniques satisfaisant, vote en simultanée). Quant à la réunion par messagerie instantanée, outre la vérification de l’accès à des moyens techniques satisfaisant et le vote en simultanée comme pour la conférence téléphonique, il est prévu que les débats sont clos par un message du président de l’instance, et que celui-ci adresse les résultats des votes à l’ensemble de ses membres.

Nouveauté : possibilité pour les élus de s’opposer à la réunion à distance sur certains thèmes sensibles

Opposition de la majorité des élus au moins 24 heures avant la réunion

La nouveauté de cette ordonnance par rapport à celle d’avril 2020 est que certaines exceptions aux réunions à distance illimitées sont prévues.

En effet, le rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance précisait « le recours à ces outils ne doit pas être le seul et unique moyen de réunir les instances représentatives du personnel, d’autant plus que de nombreuses entreprises ont pu maintenir leur activité au cours de la dernière période de confinement décidée par le Gouvernement ».

C’est pourquoi il est prévu que les membres élus des instances représentatives du personnel peuvent, à la majorité de ceux appelés à y siéger, s’opposer, au plus tard 24 heures avant le début de la réunion à distance pour les informations et consultations menées dans le cadre de :

  • la procédure de licenciement collectif prévue au chapitre III du titre III du livre II de la première partie du code du travail,
  • la mise en œuvre des accords de performance collective mentionnés à l’article L. 2254-2 du même code (APC),
  • la mise en œuvre des accords portant rupture conventionnelle collective mentionnés à l’article L. 1237-19 du même code (RCC),
  • la mise en œuvre du dispositif spécifique d’activité partielle prévu à l’article 53 de la loi du 17 juin 2020 susvisée (APLD).

Il convient de préciser que les élus ne peuvent s’opposer à la réunion par visioconférence qu’autant que la limite de 3 réunions par année civile est dépassée.

Dans ce cas la réunion doit se tenir en présentiel et même si le texte ne le précise pas, la réunion doit, bien entendu, se dérouler dans les conditions compatibles avec les règles de distanciation, le protocole sanitaire et le document unilatéral mis à jour à ce sujet.

Quelques questions demeurent

Le texte ne précise pas la forme que doit prendre cette opposition, d’autant qu’est nécessaire la majorité des « membres élus appelés à siéger » (c’est-à-dire les titulaires ou les suppléants remplaçant un titulaire absent pour cette réunion).

Il nous semble qu’un mail signé des membres s’y opposant, visant les dispositions de l’ordonnance à cet égard devrait suffire.

Par ailleurs, une autre question se pose : l’opposition des élus n’est-elle possible que dans les cas de « consultation » de l’instance sur ces thèmes ?

En effet, sur certains de ces sujets, se mêlent simples informations et consultation du CSE.

C’est par exemple le cas pour l’APLD qui n’exige la consultation du CSE que sur la mise en place du dispositif par décision unilatérale de l’employeur prise sur la base d’un accord de branche étendu ; mais qui exige une information au moins trimestrielle sur sa mise en oeuvre quelles que soient ses modalités de mise en place (décision unilatérale ou accord collectif).

Il convient de noter que concernant l’APC, la consultation du CSE sur le projet d’accord n’est pas obligatoire, mais le texte vise bien sa « mise en oeuvre », ce qui semble confirmer l’obligation de consultation du CSE sur ce dispositif, compte tenu de l’importance de ses conséquences sur l’entreprise et les salariés.

Concernant la RCC, la consultation du CSE sur l’accord n’est pas obligatoire, mais cet accord doit prévoir des modalités d’information du CSE.

Quant à la mise en oeuvre de l’accord portant RCC, il fait l’objet d’une consultation régulière et détaillée du CSE dont les avis sont transmis à la DIRECCTE.

Le texte de l’ordonnance vise bien « les informations et les consultations », il nous semble donc que les membres du CSE pourraient s’opposer à la réunion à distance dans tous les cas. Cependant, le rapport au Président de la République précise que l’opposition est possible « lorsqu’il s’agit de la consulter sur des sujets sensibles ».

Enfin, il convient donc de revenir sur les règles de sécurisation de l’organisation des réunions par visioconférence.

En effet, le législateur n’a pas encadré spécifiquement les modalités d’organisation et de préparation des réunions du CSE en visioconférence.

Ce sont donc les modalités de droit commun, en priorité, les dispositions négociées, qui ont vocation à s’appliquer.

  • Préparation technique

D’un point de vue pratique, il appartient à la Direction d’organiser la réunion, une défaillance de ce dernier pouvant donner lieu à l’intervention de l’administration du

travail (C. trav. L. 2315-27).

La conséquence de ce principe est simple : c’est à la Direction de mettre en place l’outil de téléconférence.

Le dispositif technique utilisé doit en revanche « garantir l’identification des membres du comité et leur participation effective, en assurant la retransmission continue et simultanée du son et de l’image des délibérations ».

De nombreuses plateformes de téléconférence présentent aujourd’hui ces garanties.

La difficulté réside alors dans les problèmes d’utilisation de la plateforme pour les membres du CSE (connexion internet instable, micro ou caméra défaillante, identifiants perdus).

Si ces difficultés, qui ne sont pas propres aux réunions des instances, sont en partie résorbées depuis le mois de mars 2020, la question de la responsabilité de la Direction concernant le matériel utilisé par les élus peut se poser.

C’est notamment le cas lorsqu’un représentant du personnel ne dispose pas, dans le cadre de ses fonctions, d’un ordinateur et d’un accès web à caractère professionnel. Autre problématique à prendre en compte : la sécurité d’accès de la plateforme.

De nombreuses informations échangées en cours de réunion sont de nature confidentielle.

Il appartient alors à la Direction de s’assurer de l’absence de failles de sécurité.

Paradoxalement, l’outil technique doit malgré tout permettre à des tiers à l’entreprise de pouvoir se connecter (par exemple : un médecin du travail), ce qui n’est pas automatique avec les outils internes à l’entreprise et leurs règles de sécurité.

  • Convocation et ordre du jour

La réunion suit son cadre technique habituel d’organisation, avec quelques particularités pratiques.

La convocation est initiée par l’employeur avec, si possible, les horaires d’accès à la plateforme.

Celui-ci doit s’assurer de sa bonne transmission.

Il est en outre conseillé, dès la convocation, de transmettre les modalités de connexion à la plateforme de visioconférence et de préciser qu’un seul accès par identifiant n’est possible afin d’en garantir la sécurité.

Un envoi allégé au suppléant, sans les modalités de connexion, peut en outre être envisagé.

L’ordre du jour demeure fixé conjointement entre le président et le secrétaire du CSE.

Les consultations rendues obligatoires par une disposition législative, réglementaire ou par un accord collectif de travail y sont inscrites de plein droit par l’employeur ou le secrétaire (C. trav., art. L. 2315-29).

En pratique, et y compris dans le cadre de réunions en présentiel, les intéressés tendaient à échanger préalablement leurs suggestions par téléphone, par courriels ou au cours d’un entretien informel.

En ce sens, aucun entretien physique entre le Président et le secrétaire n’est prescrit.

L’organisation en visioconférence de la réunion ne vient pas impacter cette pratique.

Le délai de communication de 3 jours a minima de l’ordre du jour aux membres du CSE a en revanche toujours vocation à s’appliquer (C. trav., art. L. 2315-30).

  • Transmission des informations utiles et précises

Le CSE dispose, dans le cadre de ses attributions consultatives, d’un délai d’examen suffisant et d’informations précises et écrites transmises ou mises à disposition par l’employeur (C. trav., art. L. 2312-15).

Ce cadre juridique n’évolue pas avec la réunion en visioconférence.

En revanche, le distanciel tend à favoriser la mise à disposition des informations nécessaires sur la base de données économiques et sociales (BDES) au lieu de la remise de leur version papier ou d’une remise en pièce-jointe d’un mail.

L’intérêt d’une base de données économiques et sociales opérationnelle s’est donc accru.

Le suivi du téléchargement des informations par l’employeur sur cette base et sa régularité sont devenus des enjeux cruciaux.

En dépendent notamment les délais préfixes de consultations applicables.

La visioconférence peut également avoir un impact sur la forme des documents préparés par les Directions et présentés aux membres du CSE.

Si la pratique des présentations (diaporama) s’était d’ores et déjà développée au détriment des documents strictement manuscrits, les échanges en cours de réunion sont, dans une configuration à distance, favorisés avec le recours à ces présentations.

Un travail documentaire supplémentaire est donc conseillé en cas de souhait de la Direction de maintenir les notes manuscrites.

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