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TELETRAVAIL ET POSSIBLE HARCELEMENT

Dans un arrêt du 19 février 2019 (n°18-83268), la chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé une décision de relaxe du chef de harcèlement moral, aux motifs que les juges du fond n’avaient pas répondu aux arguments de la salariée victime de ce harcèlement allégué, dont celui consistant à soutenir qu’elle « avait été isolée des autres salariés en raison de la demande de son employeur de travailler chez elle en télétravail, en contradiction avec sa fiche de poste ».

Dans cette espèce, la salariée, embauchée par Monsieur T. au poste de déléguée commerciale, a déposé plainte, en exposant que ce dernier « n’avait cessé de la poursuivre de ses assiduités, qu’il avait dit, lors de sa présentation au personnel de l’entreprise, qu’il disposait d’un droit de cuissage, qu’il avait fait plusieurs tentatives pour l’embrasser dans le cou et sur les lèvres, lui avait fait un attouchement sur les fesses et l’avait prise en photo alors qu’elle se trouvait en tenue de nuit, sans son accord ».

La salarié a précisé que « tous ces faits se produisaient hors la présence de témoins, du fait notamment qu’elle ne travaillait pas au sein de l’entreprise mais à son domicile, où M. T… venait la voir, notamment le matin ».

Après notamment enquête de l’inspection du travail, le supérieur hiérarchique de la salariée concernée a été cité devant le tribunal correctionnel du chef de harcèlement moral envers elle.

Le tribunal correctionnel l’a déclaré coupable et statué sur l’action civile, décision qui a été contestée devant la Cour d’appel d’Angers.

Les juges d’appel ont infirmé la décision des premiers juges et ont relaxé Monsieur T. du chef de harcèlement moral.

Saisie d’un pourvoi en cassation par une association contre les violence faites aux femmes qui était intervenue dès la première instance en soutien de la salariée, la chambre criminelle de la Cour de cassation, aux termes de sa décision du 19 février 2019, a cassé l’arrêt d’appel en ses seules dispositions civiles et renvoyé les parties devant une autre Cour d’appel.

La Haute juridiction a ainsi relevé :

« Attendu que, pour infirmer le jugement, dire que M. T… n’avait pas commis de faute civile et débouter les parties civiles de leurs demandes, l’arrêt attaqué énonce notamment que le prévenu n’a pas formellement nié avoir parlé de droit de cuissage, au sujet de Mme G… nouvellement recrutée, en indiquant notamment devant les agents de l’inspection du travail que c’était possible, ce qui ne constitue pas pour autant un aveu ; que les juges retiennent que, pour ces propos qui auraient été tenus devant plusieurs personnes, il n’a été recueilli aucun témoignage confortant les déclarations de Mme G…, ce qui ne permet pas de vérifier leur teneur et de déterminer s’ils visaient bien Mme G… personnellement ; qu’ils relèvent que les visites au domicile de Mme G… n’impliquent pas des actes ou propositions à caractère sexuel et l’évocation de problèmes personnels, même au niveau sexuel, et même répétée, si elle peut viser à susciter un intérêt ou une commisération, ne constitue pas un acte de harcèlement ; qu’ils ajoutent que les témoignages de Mme J… et Mme U… établissent que M. T… s’était déjà livré à des assiduités verbales et même à des gestes, faisant apparaître qu’il avait l’intention de parvenir à une relation intime avec ces personnes mais que lorsque des refus lui ont été clairement exposés, il n’a pas poursuivi et s’est même excusé à l’égard de Mme U… ; que les juges concluent que les faits ne sont pas établis ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, d’une part, sans répondre aux conclusions de la partie civile soutenant qu’elle avait été isolée des autres salariés en raison de la demande de son employeur de travailler chez elle en télétravail, en contradiction avec sa fiche de poste, d’autre part, sans rechercher si les faits poursuivis, dont les juges avaient admis qu’ils constituaient un comportement inadapté, n’outrepassaient pas, quelle qu’ait été la manière de servir de la partie civile, les limites du pouvoir de direction du prévenu et ne caractérisaient pas des agissements au sens de l’article 222-33-2 du code pénal, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ».

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