A l’heure où toutes les entreprises de France s’interrogent sur leur recours au chômage partiel et à la prise imposée de congés payés pour faire face à la baisse inédite de l’activité provoquée par la crise du coronavirus, LA MATMUT opte pour une voie inédite.
La mutuelle vient en effet de parvenir à un accord avec ses organisations syndicales représentatives sur la pose de congés payés pendant le confinement.
Ce dernier a été signé par la CFE-CGC, premier syndicat du groupe, la CFDT et la CFTC, dépassant à elles trois les 50% de la représentativité syndicale.
- Don de congés
Plutôt que d’appliquer l’ordonnance du 25 mars 2020, dont l'article 1 permet aux employeurs d’imposer la prise de 6 jours de congés payés, à condition qu’un accord d’entreprise ou de branche soit conclu, LA MATMUT préfère la voie du volontariat.
Selon les dispositions de l'accord d'entreprise signé, elle fait appel à la solidarité de ses salariés incités à poser ou faire don de leurs jours de congés (congés payés ou jours de congés conventionnels comme les anniversaires) dans une limite de 6 jours, avant le 3 mai.
Concrètement, les salariés peuvent faire don de leurs jours, c’est-à-dire que l’équivalent de l’intégralité de leurs salaires sera reversé à trois fondations, la Fondation de France, la Fondation Abbé Pierre, et la Fondation des Femmes, LA MATMUT abondant, en outre, pour chacun de ces jours offerts à hauteur de 20 euros.
- ou prise de congés solidaires
Les salariés pourront également opter, toujours sur la base du volontariat, pour la simple prise de jours de repos (congés payés, congés conventionnels ou RTT), auquel cas LA MATMUT abondera à hauteur de 12 euros par jour posé.
Cet abondement sera reversé aux mêmes fondations.
COVEA avait annoncé la semaine dernière un dispositif similaire baptisé « jours de congés solidarité Covéa », le groupe mutualiste (Maaf, MMA, GMF) abondant à hauteur de 10 euros par jour posé par ses collaborateurs.
L’originalité du dispositif de LA MATMUT réside dans la possibilité de faire don des jours de congés, et donc de l’équivalent en termes de rémunération, à des causes associatives.
L’accord signé ce jeudi 9 avril à LA MATMUT prévoit également la prise en charge des frais pour l’utilisation du matériel personnel dans le cadre du télétravail, avec une indemnité journalière prévue pour l’informatique et la téléphonie, le tout étant plafonné à 50 € par mois.
La CFE-CGC s’est félicitée de cet « accord novateur et mieux disant que l’ordonnance » du gouvernement, tout en « regrettant sincèrement » qu’il n’ait pas fait l’unanimité parmi les organisations syndicales.
- Pas de garantie concernant la prise imposée de CP
La CGT a refusé de signer cet accord "a priori généreux sur le papier" car "il n'apporte aucune garantie sur le fait que la direction de la Matmut s'engage à effectivement déroger à l'article 1 de l'ordonnance du 25 mars", explique le délégué syndical CGT.
En clair, le syndicaliste redoute que la mutuelle d'assurance n'ait quand même recours par la suite au dispositif légal permettant d'imposer la prise de 6 jours de congés payés. "Qui nous assure aujourd'hui que la direction ne reviendra pas à la charge en mai, si les salariés ne jouent pas le jeu du volontariat par exemple ?", s'interroge le délégué syndical CGT.
Il faudrait, en tout état de cause, pour imposer ces congés payés aux salariés que LA MATMUT obtienne un accord d'entreprise.
L'accord d'entreprise signé par l'UES MATMUT ne mentionne pas, en effet, de dérogation à l'article 1 de l'ordonnance du 25 mars sur les 6 jours de congés payés imposés.
"Contrairement à la manière dont la direction ou les syndicats signataires le présentent, cet accord d'entreprise ne déroge qu'à l'article 2 de l'ordonnance, concernant les jours de repos", souligne le délégué syndical CGT.
Cet article 2 prévoit que l’employeur peut "sous réserve de respecter un délai d'un jour franc, imposer la prise, à des dates déterminées par lui, de jours de repos au choix du salarié acquis par ce dernier ; et de modifier unilatéralement les dates de prise de jours de repos."
Ces dispositions, qui ne nécessitent pas de négociation collective dans l'entreprise et peuvent être imposées sur la seule décision de l’employeur, sont plafonnées à 10 jours de repos (article 5 de l'ordonnance).