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REPRISE APRÈS CONFINEMENT : la généralisation de la lettre recommandée électronique

Durant cette crise Covid-19, la Poste a eu du mal à organiser la distribution du courrier et en particulier des lettres recommandées avec AR.

Or, en droit du travail, de nombreuses procédures exigent, à titre probatoire, une lettre recommandée (sanction disciplinaire, notification de licenciement, etc…) et nombre de délais commencent à courir à compter de la date de première présentation du courrier à son destinataire.

Il en va par exemple du délai minimum de 5 jours ouvrables fixé entre la date de la remise de la convocation à entretien préalable à un éventuel licenciement et la tenue de ce dernier (article L 1233-11, al. 3 du Code du travail).

Compte tenu des difficultés rencontrées, des entreprises ont donc utilisé la lettre recommandée électronique.

En effet, à l’heure où le numérique semble indispensable afin d’assurer un minimum de continuité dans les activités ne nécessitant pas forcément une présence sur site (email, téléphonie IP, visioconférence, espaces de stockage en ligne, VPN, etc.), certains opérateurs proposent des services de recommandé en ligne.

Les principaux acteurs de ce marché en voie constante de digitalisation sont AR24 (largement utilisé par les notaires), ClearBUS, et même La Poste.

Cela étant, plusieurs questions se posent sur la valeur juridique de cette lettre recommandée électronique.

Il convient tout d’abord de rappeler le principe posé par l’article L. 100 du Code des postes et des communications électroniques selon lequel l’envoi recommandé électronique est équivalent à l’envoi par lettre recommandée et ce, depuis le 1er janvier 2019.

La LRE au 01.01.2019

Le mécanisme

Elle est définie précisément (CPCE art. L 100, et R 53-2 s.)  :

  • l’expéditeur reçoit une preuve du dépôt électronique de l’envoi de la LRE du prestataire,
  • le destinataire est informé par le prestataire et par voie électronique, qu’une LRE lui est destinée et qu’il peut l’accepter ou non pendant 15 jours à compter du lendemain de l’envoi de cette information (l’expéditeur ne lui est pas indiqué),
  • si le destinataire accepte la LRE, elle lui est transmise,
  • s’il la refuse ou ne la réclame pas, le prestataire met à la disposition de l’expéditeur, au plus tard le lendemain de l’expiration du délai de 15 jours, une preuve du refus (avec date et heure de celui-ci) ou de la non-réclamation.

Avec des délais

L’expéditeur a accès à ces informations pendant 1 an, et les preuves de l’expédition, de l’acceptation, du refus ou de la non-réclamation de la LRE doivent être conservées par le prestataire pendant au moins 1 an.

Les effets

L’envoi recommandé électronique équivaut à l’envoi par lettre recommandée avec AR dès lors qu’il est conforme aux exigences des textes. La vérification de l’identité des expéditeur et destinataire de la lettre appartient au prestataire de services (CPCE art. R 53-1).

Champs d’application de la LRE

Le salarié doit être d’accord

Comme auparavant, lorsque le destinataire n’est pas un professionnel, vous devez obtenir son accord préalable à la réception d’une LRE.

Si vous souhaitez utiliser la LRE, vous avez tout intérêt à prévoir l’accord de principe des salariés, par la signature formulaire pour chaque salarié présent ou lors de l’embauche.

À notre avis, le salarié pouvant changer d’avis, il vaut mieux éviter l’insertion dans le contrat de travail.

Extension à la rupture du contrat

Jusqu’au 31.12.2018, il n’était pas certain que la LRE puisse être utilisée en matière de rupture du contrat de travail, les modes habituels (LR/AR, remise en main propre) restant plus sûrs.

Depuis le 01.01.2019, vous pouvez en revanche aussi notifier une rupture de contrat par LRE. Attention toutefois, dès lors qu’une rupture nécessite une double signature, notamment la rupture conventionnelle, vous devez respecter bien sûr les formalités propres à ce type de rupture.

Les conséquences sur la transaction

Jusqu’à présent

La jurisprudence a toujours subordonné la validité de la transaction :

  • à son caractère postérieur à la notification de la rupture du contrat, pour que le lien de subordination entre le salarié et l’employeur soit rompu (Cass. soc. 14.06.2006 n° 04-43.123),
  • à la condition que la rupture du contrat ait été notifiée par LR/AR, peu importe qu’un autre mode de notification soit admis pour apprécier la validité de la rupture : si ce n’est pas le cas, la transaction qui suit la rupture est nulle (Cass. soc. 10.10.2018 n° 17-10.066).

Depuis janvier 2019

La LRE peut être utilisée pour notifier la rupture du contrat de travail, et équivaut à l’ancienne LR/AR.

Conséquence directe, à notre avis, toute rupture de contrat notifiée par LRE pourra faire l’objet d’une transaction.

La LRE, plus simple d’utilisation que l’ancienne LRAR classique, pourrait devenir le moyen le plus sûr de notifier une rupture, tout en permettant si besoin ensuite de conclure une transaction, ce qui reste impossible avec une notification de rupture remise en main

Ensuite, selon l’article du Code des postes et des communications électroniques précité, dans le cas où le destinataire n’est pas un professionnel, celui-ci doit avoir exprimé à l’expéditeur son consentement à recevoir des envois recommandés électroniques.

Le salarié n’étant naturellement pas un « professionnel », il doit avoir préalablement consenti à l’envoi de lettres recommandées sous forme électronique.

Or, la plupart des employeurs n’ont, à ce jour, jamais sollicité le consentement de leurs salariés pour qu’ils reçoivent de tels recommandés, ce qui a pu rendre plus difficile l’envoi de la lettre recommandée électronique.

Afin de sécuriser au mieux ce nouveau mode d’envoi et d’utiliser au mieux les services numériques qui s’offrent aux employeurs et leur permettent notamment de faciliter leurs procédures RH, nous recommandons vivement le recours à la lettre recommandée électronique, et ce dès la reprise.

Au préalable, il doit être demandé individuellement aux salariés de signer un document par lequel, afin de faciliter les procédures RH, ils acceptent de recevoir des envois recommandés électroniques de la part de leur employeur.

Ce courrier doit également mentionner l’adresse électronique personnelle sur laquelle le salarié aura consenti à réceptionner d’éventuels envois recommandés électroniques.

Enfin, le salarié doit s’engager à communiquer à l’employeur tout changement d’adresse électronique personnelle.

Les employeurs doivent toutefois prendre garde à ce que les contrats de travail de leurs salariés soient à jour des réglementations françaises et européennes (RGPD) concernant le droit à l’information du collaborateur sur la finalité des traitements des données collectées.

A l’avenir, pour les nouvelles embauches, ces dispositions peuvent être directement insérées au sein d’une nouvelle clause spécifique dans le contrat de travail.

Enfin, en pratique, quel que soit le prestataire choisi pour vos envois de lettres recommandées sous forme électronique, afin de bénéficier de la présomption de fiabilité, il convient de vérifier que le service proposé vous assure la remise d’un récépissé de dépôt comportant les informations suivantes :

  • le nom et le prénom ou la raison sociale de l’expéditeur, ainsi que son adresse électronique,
  • le nom et le prénom ou la raison sociale du destinataire ainsi que son adresse électronique,
  • un numéro d’identification unique de l’envoi attribué par le prestataire,
  • la date et l’heure du dépôt électronique de l’envoi indiquées par un horodatage électronique qualifié,
  • la signature électronique avancée ou le cachet électronique.

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