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Quand intimider son employeur en menaçant de saisir la justice dégénère en abus

Si le droit d’agir en justice contre son employeur constitue une liberté fondamentale, son exercice trouve sa limite lorsque le salarié l’utilise dans une logique d’intimidation de son employeur.

Un arrêt de la Cour de cassation du 7 décembre 2022 (n°21-19280) constitue une illustration de l’abus de ce droit.

Sauf mauvaise foi, un salarié est libre de déposer une plainte pénale contre son employeur (Cass. soc. 28-4-2011 no 10-30.107) ou de témoigner en justice en sa défaveur (Cass. soc. 4-4-2006 no 04-44.549).

Le licenciement prononcé pour ce motif est alors nul (Cass. soc. 29-10-2013 no 12-22.447; Cass. soc. 9-10-2019 no 18-14.677), y compris lorsqu’il sanctionne l’éventualité d’une action en justice du salarié à l’encontre de son employeur (Cass. soc. 21-11-2018 no 17-11.122).

En effet, la liberté d’agir en justice constitue une liberté fondamentale.

Pour autant, comme toute liberté fondamentale, le droit d’agir en justice trouve sa limite lorsque le salarié en abuse. L’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 7 décembre 2022 en apporte une parfaite illustration.

Un salarié menace son supérieur à plusieurs reprises

Dans le cas de l’arrêt du 7 décembre 2022, un conducteur de métro de la RATP est licencié pour faute grave.

Dans sa lettre de révocation, il lui est reproché d’avoir tenté d’intimider un supérieur en le menaçant d’un dépôt de plainte au commissariat de police s’il persistait dans sa volonté de le recevoir en entretien disciplinaire.

Deux ans auparavant, il avait déjà usé de cette menace à l’égard de son supérieur sans la mettre à exécution.

Le salarié estime alors que son licenciement est nul, dans la mesure où il est intervenu en raison d’une action en justice introduite ou susceptible d’être introduite par lui à l’encontre de son employeur. Il n’obtient pas gain de cause.

Pour les juges du fond, l’expression par le salarié de son souhait de déposer plainte contre son employeur ne résulte pas d’une authentique volonté d’agir en justice.

Elle illustre, dans un contexte global de menaces à l’endroit de ses collègues et supérieurs, une logique d’intimidation de son interlocuteur.

Le salarié a ainsi fait preuve de mauvaise foi et d’un abus dans l’exercice de son droit d’agir en justice.

Des menaces répétitives d’agir en justice sont abusives

La Cour de cassation confirme la décision des juges du fond et juge que l’abus du droit d’agir en justice est bien caractérisé.

S’appuyant sur le pouvoir souverain d’appréciation des faits dont disposent les juges du fond en la matière, la Cour de Cassation relève en effet que le salarié a, à plusieurs reprises, menacé de déposer plainte contre son supérieur au commissariat de police.

Pour caractériser l’abus, les juges semblent donc sensibles au caractère répétitif des menaces.

C’est cette multiplication des faits qui leur permet d’admettre, en l’espèce, qu’il s’agit bien d’une nouvelle illustration, dans un «contexte global de menaces», de «la logique d’intimidation» dont le salarié a fait preuve dans le passé.

L’attitude du salarié caractérise en effet sa mauvaise foi et permet aux juges de mettre en évidence l’absence d’atteinte à sa liberté fondamentale d’agir en justice (voir, en ce sens déjà, Cass. soc. 26-2-2020 no 18-22.790).

Un tel abus n’est que rarement reconnu par la Cour de cassation, ce qui fait tout l’intérêt de cette décision.

https://www.courdecassation.fr/decision/63903d920f8a5205d45d7d7d

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