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CDD, activité partielle, prêt de main d’œuvre, titres restaurant : le Gouvernement prépare une nouvelle série d’ordonnances

nouvelles ordonnances

On pensait que le droit du travail avait été amplement, et suffisamment réformé pour un certain temps, par les ordonnances de 2017 prises en début de mandat par la nouvelle majorité mais, la crise sanitaire est l’occasion pour l’exécutif de multiplier les changements, tous présentés comme urgents, nécessaires et temporaires.

Depuis plusieurs semaines, le gouvernement alimente un flot continu de textes législatifs et réglementaires, sans que ceux-ci ne soient précédés des habituelles consultations ou concertations nationales : état d’urgence sanitaire, ordonnances et décrets sur l’activité partielle, sur les CSE (modalités de réunion, délais et expertises, élections), sur l’indemnisation chômage, sur la prime de pouvoir d’achat, etc…

Sans parler des autres textes qui en découlent (comme les questions-réponses et autres fiches conseils ou protocoles) et dont la portée juridique est incertaine.

Cette fois, c’est donc un nouveau projet de loi habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnance qui a été adopté jeudi 7 mai en Conseil des ministres.

Pas moins de 33 ordonnances sont prévues par ce texte, dont au moins cinq habilitations “n’ont pas de lien avec les conséquences de la propagation de l’épidémie du Covid-19 et ne figurent dans le projet de loi qu’en raison du souhait du gouvernement, du fait des incertitudes affectant le calendrier parlementaire, de permettre l’adoption dans le plus bref délais des mesures envisagées”, estime le Conseil d’Etat dans son avis.

Une fois votée au Parlement, la loi donnera six mois au gouvernement pour prendre ces ordonnances, sachant que certaines de ces mesures pourront entrer en vigueur “si nécessaire à compter du 12 mars”, c’est-à-dire de façon rétroactive.

Ce pourrait être le cas, par exemple, de la disposition visant à permettre la constitution de droit à retraite dans les régimes de base pour les salariés placés en activité partielle, ou de celle modifiant les règles de calcul de l’assurance chômage.

La liste des changements envisagés dans le domaine social

Pendant l’état d’urgence et même durant les six mois qui suivront son terme (c’est-à-dire sans doute jusqu’en janvier 2021), afin de “limiter les fins et les ruptures de contrats de travail, d’atténuer les effets de la baisse d’activité, de favoriser et d’accompagner la reprise d’activité”, le gouvernement envisage de modifier par ordonnance les domaines suivants.

L’activité partielle

Il s’agit “d’adapter les règles aux caractéristiques des entreprises, à leur secteur d’activité ou aux catégories de salariés concernés”, tout cela dans un contexte de reprise d’activité.

Il pourrait s’agir d’adapter les modalités de l’activité partielle selon que l’activité est de facto interdite par les mesures sanitaires ou qu’elle reste possible, précise l’entourage de la ministre du travail.

Il s’agira aussi, pour les salariés en chômage partiel, de permettre la constitution de droits à retraite grâce au Fonds de solidarité de vieillesse, qui financera ces trimestres.

Est aussi prévu le maintien des garanties de protection sociale complémentaire (parfois suspendues pendant la suspension du contrat de travail en cas de chômage partiel), les conditions de versement et le régime fiscal et social des contributions des employeurs lors de ces périodes devant aussi être revus.

Les contrats à durée déterminée et les contrats de travail temporaire

Les changements porteront sur le renouvellement de ces contrats, “leur succession sur un même poste ou avec le même salarié”.

Les employeurs pourraient mettre en oeuvre “par convention d’entreprise” ces assouplissements dérogeant aux règles habituelles en fixant une durée maximale de CDD ainsi que le nombre de renouvellements possible.

Pour les CDD, il s’agit, dit l’étude d’impact, de pouvoir “prolonger des relations de travail qui n’ont pas pu se dérouler dans les conditions attendues du fait du recours à l’activité partielle et de faciliter les nouvelles embauches permettant de faire face aux nécessités de cette reprise d’activité”.

Les règles qui seraient fixées par accord d’entreprise pourraient traiter “du mode de calcul du délai de carence, ainsi que des cas dans lesquels ce délai ne s’applique pas”.

Pour les contrats de travail temporaire, l’étude d’impact indique qu’au vu des circonstances exceptionnelles, “il pourrait être envisagé d’élargir les conditions de renouvellements ou de prolongation de ces contrats au-delà de la durée maximale fixée par le code du travail, afin de sécuriser leur parcours d’accès à l’emploi durable”.

Pour les CDD, il s’agirait du retour en force d’une idée que le gouvernement avait envisagé d’imposer dans les ordonnances de 2017.

Il avait finalement choisi de confier la responsabilité à la branche, et non à l’entreprise, de fixer la durée totale d’un CDD ainsi que les possibilités de son renouvellement, par dérogation aux dispositions du code du travail.

Si la future ordonnance permettait à l’entreprise de modifier certaines modalités du CDD, c’est donc l’équilibre entre les trois blocs normatifs du travail qui serait affecté.

Les CDD liés à des travaux de recherche (article L.412-2 du code de la recherche).
Les contrats de travail aidés relevant des dispositifs d’insertion, d’accès et de retour à l’emploi.
Les dispositions concernant les travailleurs saisonniers, notamment en vue d’allonger de six à neuf mois la durée de séjour annuelle des travailleurs étrangers, et pour traiter les demandes de visas de long séjour ayant expiré entre le 16 mai et le 15 juin 2020.
Les conditions de mise en place de l’intéressement dans les petites entreprises

Dans les sociétés de moins de 11 salariés sans élu du personnel ou délégué syndical, l’employeur, qui doit actuellement faire ratifier son projet par les deux-tiers du personnel, pourra mettre en place unilatéralement un régime d’intéressement.

Les conditions et modalités du prêt de main d’oeuvre

Le but est d’en faciliter le recours, mais “seulement” jusqu’au 31 décembre 2020 [en 2017, le gouvernement a déjà étendu la possibilité de prêt de main d’oeuvre pour permettre aux entreprises d’au moins 5 000 salariés de mettre à disposition leurs salariés auprès de start-up ou PME de moins de 250 salariés].

Là, il s’agirait de permettre à tout type d’entreprises d’avoir recours au prêt de main d’oeuvre.

“L’adoption de ces formalités (convention individuelle et consultation préalable des CSE), prévues à un niveau législatif, nécessite des modifications législatives”, précise l’étude d’impact.

Les règles d’affectation de la contre-valeur des titres-restaurants

Sont concernés les titres émis pour l’année 2020 et périmés, “afin de contribuer au financement d’un fonds de soutien aux restaurateurs”.

Autrement dit, il s’agit de “rediriger vers un fonds de soutien” au secteur de la restauration “tout ou partie des sommes correspondant aux titres en circulation qui s’avéreraient périmés en mars 2021”.

Sur ce sujet, le Conseil d’Etat est à l’origine de la limitation de cette possibilité aux seuls titres émis en 2020, car si les titres émis en 2019 avaient été englobés, “l’affectation de ces sommes au fonds envisagée porterait, au regard de la créance ainsi constituée au bénéfice des comités sociaux économiques ou, à défaut, des entreprises concernées, une atteinte non proportionnée au droit de propriété (..) ainsi qu’au droit au respect des biens”.

Chômage, prud’hommes, scrutin TPE

Le gouvernement se donne aussi les moyens d’adapter “à titre exceptionnel” le mode de calcul de l’indemnité chômage à compter du 1er mars 2020 mais aussi d’affecter une partie des réserves financières du régime de retraite complémentaire des indépendants (RCI) “au financement d’une aide financière exceptionnelle destinée aux travailleurs indépendants en activité affiliés à ces régimes”.

La ponction dans ces réserves, précise l’exposé des motifs, ne doit pas “altérer” la capacité du régime à honorer ses engagements…

Par ailleurs, le gouvernement pourra modifier “la durée ou la date limite de désignation du titulaire de tout mandat, hormis les mandats issus d’élections politiques”, et ce jusque six mois après la date de cessation de l’état d’urgence qui devrait être prolongé jusqu’en juillet prochain.

Cela concernera les représentants des salariés dans les conseils d’administration, les conseils de surveillance des sociétés anonymes ou au sein des ordres professionnels.

Par ailleurs, le ministère du travail, qui a évoqué le sujet avec les partenaires sociaux, envisage d’ajuster la durée des mandats des conseillers prud’hommes (dont la prochaine désignation est repoussée au plus tard jusqu’en décembre 2022), et de modifier l’intervalle entre les deux prochains scrutins dans les très petites entreprises, ceci afin de “préserver la corrélation avec les cycles de mesure de l’audience syndicale et patronale”.

Il convient de signaler enfin, à titre de curiosité au rayon IRP, la future modification des missions des comités d’agence et des conditions de travail des ARS, les agences régionales de santé, (article L.1432-11 du code de santé publique), “notamment pour définir leurs compétences et déterminer leurs ressources en matière d’activités sociales et culturelles”.

Toutes ces ordonnances devront être ratifiées dans un délai de trois mois à compter de leur parution.

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